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Paillages : la preuve par quatre

L'essai de paillages mené par l'association Arbres et Paysages d'Autan (31) vise à comparer trois produits dégradables au plastique.

En Midi-Pyrénées, une association a testé pendant six ans des paillages à base de dalles, copeaux et feutre, qu'elle a comparés aux paillages en plastique. Ce dernier fait désormais l'unanimité... contre lui.

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Pionnière dans l'utilisation des paillis biodégradables, l'association Arbres et Paysages d'Autan, basée en Haute-Garonne, a été mandatée par les opérateurs techniques de la haie champêtre de Midi-Pyrénées pour mener une étude expérimentale visant à comparer sur le long terme les performances de trois paillis biodégradables à celles du paillis en plastique. Ce projet est financé par l'Agence de l'eau Adour-Garonne, l'Europe et le conseil régional de Midi-Pyrénées.

1 LE CONTEXTE.

Depuis plusieurs années, les griefs financiers et environnementaux contre les paillis en plastique s'accumulent. Lorsqu'ils ne sont pas retirés, ils se fragmentent progressivement en de petites particules qui polluent durablement les sols. Depuis 2003, les utilisateurs de ces paillis sont tenus de les retirer après usage et de trouver des filières de traitement. Les coûts inhérents à ce retrait et à ce recyclage rendent le matériau nettement moins compétitif. Sa fabrication et son recyclage engendrent par ailleurs des coûts énergétiques et environnementaux non négligeables.

Pourtant, le recours au plastique est encore largement répandu, car beaucoup le pensent plus efficace. L'expérimentation menée par l'association Arbres et Paysages d'Autan a deux objectifs majeurs : déterminer si le plastique est réellement plus efficace que les paillis biodégradables sur le long terme et tester l'impact de ces deux catégories de matériaux sur la vie du sol et sur la végétalisation de la plantation.

2 LE PROTOCOLE.

Mise en place en 2005 pour une durée de six ans, la parcelle expérimentale comprend deux cent quarante plants de frênes soumis à différentes modalités de paillage : copeaux de bois (broyat de branches), dalles de bois compacté, feutre végétal (bois et jute), plastique (bâche noire en polyéthylène), sol nu (témoins). Plusieurs séries de mesures ont été effectuées : la croissance des plants en hauteur et en diamètre chaque année, l'envahissement des paillis par les herbes concurrentes les trois premières années suivant la plantation, la richesse et l'abondance de la faune du sol sous les paillis un an après la plantation, et la colonisation des paillis par les ligneux environnants chaque année.

3 LES RÉSULTATS.

L'intérêt du paillage est confirmé : les quatre paillis ont amélioré la croissance des plants, en hauteur et en diamètre, par rapport aux témoins. Les copeaux se sont montrés plus efficaces que le plastique ; les dalles et le feutre affichent, quant à eux, des performances statistiquement équivalentes. Les copeaux ont permis une augmentation du diamètre des plants de 113 % par rapport aux témoins contre environ 50 % pour les trois autres paillis. Très efficace les premières années, le plastique constitue à moyen terme une barrière empêchant le renouvellement de la matière organique du sol par les branches et les feuilles mortes et réduisant d'autant les réserves nutritives des plants. A contrario, la décomposition des paillis biodégradables permet un enrichissement du sol en matière organique, mais celui-ci n'intervient que dans un second temps. En présence de deux dynamiques temporelles si différentes, seule une expérimentation à long terme peut permettre de conclure sur l'efficacité de ces deux types de matériaux.

4 LA BIODIVERSITÉ.

Envahis plus rapidement que le plastique, les trois paillis biodégradables ont tout de même permis de limiter le développement des herbes durant les trois premières années, période où elles concurrencent le plus les jeunes plants. Au-delà, le désherbage est à la fois inutile et dommageable : non seulement les plants ne sont plus perturbés par les herbes, mais le développement d'une strate herbacée à leur pied est favorable à la biodiversité. Un an après la plantation, la faune du sol (vers de terre, insectes, mille-pattes...) s'est avérée plus riche et plus abondante sous les copeaux, le feutre et les témoins que sous les dalles et le plastique.

On a ainsi dénombré huit fois plus d'individus sous les copeaux que sous le plastique. Ne pas perturber l'écosystème revient ici à favoriser un facteur de croissance dans la mesure où la faune du sol contribue à alimenter les plants en eau et en nutriments. D'une part, elle améliore la rétention en eau du sol en creusant des microgaleries et, d'autre part, elle fragmente la matière organique qui, une fois dégradée par les micro-organismes, fournira les nutriments nécessaires à la croissance des plants.

Les copeaux ont été deux fois plus colonisés par des ligneux spontanés que les autres paillis. Un tel enrichissement de la plantation est particulièrement intéressant dans le cas d'une haie. En effet, plus cette dernière est dense et diversifiée, plus elle joue son rôle de brise-vent, de maintien des talus, d'épuration de l'eau et de refuge pour la biodiversité.

5 LES PERSPECTIVES.

Cette expérience montre que les performances des paillis plastiques peuvent au minimum être égalées par celles des paillis biodégradables. En sus d'allier parfaitement efficacité et respect de l'environnement, les copeaux présentent l'avantage d'être accessibles financièrement, voire gratuits. En effet, les communes et les entreprises d'espaces verts ou d'élagage doivent payer pour mettre leurs déchets de taille en décharge. Ils ont donc tout intérêt à s'équiper de broyeurs et à livrer les particuliers et les organismes demandeurs situés à proximité des chantiers de taille ou à laisser le matériau à disposition sur une plate-forme de stockage. S'agissant de déchets, les résidus de taille ne peuvent être commercialisés en tant que produit, et seuls les services broyage et livraison peuvent éventuellement être rémunérés. Les particuliers disposant d'un grand terrain à entretenir peuvent, quant à eux, se regrouper pour louer ou acheter un broyeur. Des solutions simples existent donc pour développer ce matériau efficace, économique et écologique.

Notons enfin que les paillis biodégradables manufacturés permettent de valoriser certains déchets. À titre d'exemple, le feutre végétal utilisé dans l'expérimentation a été fabriqué à partir de rebuts de l'industrie textile.

Delphine Even

Le feutre végétal donne des résultats comparables aux dalles. La dégradation du produit enrichit le sol en matière organique.

Sur une durée de six ans, les copeaux de bois offrent les meilleurs résultats.

Les dalles de bois assurent, comme le plastique ou le feutre, un gain de croissance de 50 % sur six ans.

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